Surveillance et prévention des infections à VIH et des infections sexuellement transmissibles bactériennes
ÉDITO
Santé publique France produit chaque année, à l’occasion de la « Journée mondiale de lutte contre le sida », des données actualisées sur l’infection par le VIH et les infections sexuellement transmissibles (IST) bactériennes en France.
Au plan national, l’activité de dépistage du VIH, qui avait diminué entre 2019 et 2020 en lien avec l’épidémie de Covid-19, a ré-augmenté en 2021 (+13%), sans toutefois retrouver le niveau de 2019. En Guadeloupe, l’augmentation est plus importante en 2021 (+56%) mais reste encore largement inférieure à celle observée en 2019.
En France, le nombre de personnes nouvellement diagnostiquées VIH+ pour 2021 est estimé à environ 5 000, nombre comparable à celui de 2020 avec une stabilité observée quel que soit le mode de contamination ou le lieu de naissance
expliquée en partie par la diminution de l’activité de dépistage, mais possiblement aussi par une moindre exposition au VIH liée aux mesures de distanciation sociale lors de l’épidémie de Sars-CoV2. Néanmoins, ces nouvelles infections à
VIH sont découvertes à un stade avancé de l’infection, proportion qui ne diminue pas depuis plusieurs années comme c’est également le cas dans notre région avec des proportions supérieures au niveau national. Ceci constitue une perte de chance en terme de prise en charge individuelle, et un risque de transmission du VIH aux partenaires avant la mise sous traitement antirétroviral.
Ces données reflètent une très probable dégradation et un retard au dépistage, ce qui doit nous alerter, alors même que nous demeurons l’une des régions avec le taux d’activité de dépistage VIH le plus élevé.
La journée mondiale de la lutte contre le VIH/Sida, a pour slogan cette année « Poussons pour l’égalité ». C’est l’occasion pour nous tous, professionnels de santé, acteurs de la société civile, politiques de nous RÉENGAGER pour que toute personne, quel que soit son genre, son orientation sexuelle, son origine, ses vulnérabilités, puisse avoir accès de manière égale à une information juste, fondée sur des connaissances scientifiques et non sur de fausses croyances ou « fake news » ainsi qu’à tous les progrès et outils innovants qui sont venus enrichir l’offre de dépistage et de prévention du VIH ces dernières années.
Nous devons renforcer notre mobilisation pour lutter contre les inégalités qui s’accroissent et pour aller ensemble vers « une Guadeloupe sans Sida ».
Dr Isabelle Lamaury, présidente du Corevih de Guadeloupe, Saint-Martin, Saint-Barthélemy
POINTS CLÉS
VIH/Sida
● La participation à l’enquête LaboVIH et la déclaration des nouveaux diagnostics de VIH via e-DO par les cliniciens et les biologistes sont indispensables pour la production d’indicateurs de surveillance fiables. Les estimations du taux de sérologies
positives (LaboVIH) et des découvertes de séropositivité (incidence VIH) et Sida pour la région de Guadeloupe n’ont pas été possible en 2021 comme en 2019-2020 (limites d’application du facteur correctif) ; néanmoins la participation des biologistes à LaboVIH en 2021 (85%) et les notifications obligatoire des cas par les cliniciens permet un suivi fiable de l’épidémie du VIH dans notre région
● Une reprise du dépistage de l’infection à VIH est observée en 2021 après la chute importante documentée en 2020 mais reste encore inférieure au taux de dépistage observé en 2019 (-22%) ; La Guadeloupe fait partie des régions où l’activité de dépistage est la plus élevée de France avec la Guyane et la Martinique en 2021
● Le nombre de découvertes de séropositivité est stable en 2021 par rapport à 2020 (63 vs 62 cas) ; La stabilité du nombre de découvertes de séropositivité en 2021 est observée quel que soit le mode de contamination ; Les cas sont majoritairement âgés
entre 25-49 ans et d’orientation hétérosexuelle, part largement supérieure au niveau national (71% vs 43% métropole hors Ile-de- France), avec plus d’un tiers des cas de nationalité étrangère
● En 2021, près d’un tiers des infections à VIH ont été découvertes à un stade avancé de l’infection
● Baisse importante de l’usage des TROD en 2021 (-31%) par rapport à 2020
● Baisse des ventes d’autotests VIH en 2021 par rapport à 2020 (-12%) Infection à Chlamydia trachomatis
● En 2021, le taux des dépistages remboursés est de 82,1 / 1000 habitants largement supérieur au taux national (41,8/ 1000)
● Après une tendance à la baisse en 2020 dans toutes les classes d’âges, le taux des dépistages remboursés augmente à nouveau en 2021 (+ 14 %) en particulier chez les femmes et les hommes âgés de moins de 25 ans alors que les dépistages gratuits en CeGIDD de la région ont diminué en 2021 (- 21 %)
● Entre 2020 et 2021, le nombre de diagnostics d’infection à Ct a augmenté de 45%, dépassant le taux de 2019 (2,5/ 1000). En 2021, le taux régional est de 3,0 / 1000 habitants (contre 1,7/ 1000 au niveau national).
● Cette augmentation est plus marquée chez les femmes que chez les hommes (+59% vs +33%) et encore davantage chez les jeunes (+65% chez les femmes de 15 à 24 ans et +58 % chez les hommes de 15 à 24 ans)
● Le taux de positivité en CeGIDD de la région est en augmentation en 2021, plus élevé chez les hommes (14%) que chez les femmes (12%)
● Environ 60 % des cas d’infections à Ct ayant consulté en CeGIDD de Guadeloupe étaient des hommes ; la majorité d’entre eux avait moins de 26 ans, rapportaient des relations hétérosexuelles avec notion de multi partenariat, 30% avaient des signes
évocateurs et 1 sur 10 des antécédents d’IST.A Saint-Martin, les caractéristiques des cas d’infection à Ct ayant consulté en CeGIDD concernaient en majorité des femmes (78%), un tiers des cas étaient de nationalité étrangère et un quart avaient des
antécédents d’IST. Le multi partenariat était rapporté en proportion plus faible qu’en Guadeloupe (57% vs 81%) Infection à gonocoque
● En 2021, le taux des dépistages remboursés est de 84,3 / 1000 habitants largement supérieur au taux national (48,5/ 1000)
● Une reprise du dépistage est observée en 2021 (+ 11 %) pour les dépistages remboursés alors que les dépistages gratuits en CeGIDD de la région ont diminué (- 21 %)
● Le taux de dépistage est particulièrement élevé chez les femmes de moins de 25 ans, proche du taux de dépistage des infections à Ct (dépistage conjoint par multiplex)
● En 2021, le taux de dépistage pour une infection à gonocoque a augmenté davantage chez les hommes (+16% vs 9% chez les femmes) par rapport à 2020, particulièrement chez les moins de 25 ans
● En CeGIDD, le taux de positivité est deux fois plus élevé chez les hommes (6 %) en 2021 ; ce taux est le plus important observé chez les hommes (+ 2,1 points en 2021 p/r à 2019) alors qu’il est stable chez les femmes par rapport à 2019
● La majorité des cas ayant consulté en CeGIDD de Guadeloupe était des hommes de moins de 26 ans, nés en France rapportant en majorité des rapports hétérosexuels avec notion de multipartenariat et présentait fréquemment des signes évocateurs d’IST (>50%). A Saint-Martin, une vingtaine de cas ont été diagnostiqués en 2021 avec des caractéristiques quasi-similaires à ceux décrits en Guadeloupe excepté la nationalité étrangère plus fréquente (42% vs 6%) Syphilis
● Une reprise du dépistage de la syphilis est observée en 2021 avec un taux de dépistage de 112,6 pour 1 000 habitants, le plus élevé depuis 2014 dans la région ; Comme pour le dépistage des infections à Ct et des gonococcies, c’est en Guyane et dans les Antilles que le taux de dépistage de la syphilis est le plus élevé de France ;
● Cette reprise concerne aussi bien les femmes et les hommes (+15% p/r à 2020) en particulier les moins de 25 ans (+25% chez les jeunes hommes vs +20% chez les jeunes femmes)
● Le taux de dépistage est plus élevé chez les femmes (dépistage obligatoire lors d’une grossesse). A noter que le taux chez les hommes de plus de 25 ans est supérieur à celui des moins de 25 ans contrairement aux autres régions de France
● Comme pour les dépistages des autres IST en CeGIDD, ceux de la syphilis ont diminué en 2021 (-18 %)
● En CeGIDD, le taux de positivité est faible chez les hommes (< 1%) et nul chez les femmes en 2021, en baisse p/r à 2020
● Au total, 5 cas de syphilis ont été diagnostiqués en 2021 dans la région (contre 14 en 2020)
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